L’automne a été propice aux réformes : A quoi va-t-il falloir faire attention en matière de garanties et notamment dans le cas d’une faillite ?
1. Réforme des sûretés par l’ordonnance n° 2021-1192 du 15 septembre 2021 et changement au 1 janvier 2022.
Sur la fiducie
L’ordonnance du 15 septembre 2021 portant réforme du droit des sûretés consacre la fiducie sûreté qui est la propriété cédée à titre de garantie.
Les articles 2372-1 à 2372-5 du code civil explique cette notion.
Un nouvel article 2372-1 apporte une précision sur l’obligation garantie : si elle peut être future, elle doit être déterminable.
A peine de nullité, le contrat de fiducie sûreté doit rappeler les mentions de l’article 2018 du code civil (identification du ou des bien(s) transféré(s), durée du transfert fiduciaire, etc.) mais aussi la dette garantie et la valeur estimée du bien ou du droit transféré dans le patrimoine fiduciaire.
À compter du 1er janvier 2022, seule la dette garantie devra être mentionnée dans le contrat de fiducie sûreté. La valeur estimée n’aura donc plus à être mentionnée. Cependant, nous conseillons au bénéficiaire de demander que cette valeur estimée soit mentionnée pour faire partie du contrat.
En effet, selon l’article 2026 du code civil, le fiduciaire est responsable sur son patrimoine propre des fautes qu’il commet dans l’exercice de sa mission.
Le créancier peut se voir remettre le bien cédé. Il devait jusqu’ici faire déterminer la valeur du bien à titre d’expert : à la suite de la réforme, si le fiduciaire ne trouve pas d’acquéreur au prix fixé par l’expert, il peut, sous sa responsabilité, le vendre au prix qu’il estime correspondre à sa valeur. En pratique, le bénéficiaire sera bien avisé de prendre l’accord du constituant sur la nouvelle valeur estimée du bien (v. en ce sens DPDE oct. 2021, p. 30 s.).
La réforme des cautions et du livre VI du code de commerce depuis l’ordonnance n° 2021-1193 du 15 septembre 2021 complétée par le décret n° 2021-1218 du 23 septembre 2021
Les changements sur le régime des sûretés opérés par l’ordonnance du même jour imposent des changements en droit des entreprises en difficulté.
Le sort de cautions est amélioré :
• La caution a la possibilité d’opposer au créancier non seulement les exceptions inhérentes à la dette mais aussi les exceptions purement personnelles au débiteur.
Toutefois il va falloir être vigilent car le rapport au président de la République qui accompagne la publication de l’ordonnance n° 2021-1193 indique que le droit des procédures collectives ou le droit du surendettement peuvent cependant prévoir des solutions différentes.
• En ce qui concerne le caractère excessif du crédit accordé en regard des capacités financières du débiteur ou de celles de la caution, le nouvel article 2299 du code civil prévoit à présent que ce caractère ne sera plus apprécié qu’en considération des capacités du débiteur.
• L’article L 622-34 nouveau précise que même avant paiement, les coobligés ou les personnes ayant consenti une sûreté personnelle ou ayant affecté ou cédé un bien en garantie peuvent procéder à la déclaration de leur créance pour préserver leur recours personnel.
La caution qui a effectué un paiement partiel avant l’ouverture de la procédure collective ou après cette ouverture jusqu’à l’expiration du délai de déclaration de la créance pourra déclarer sa créance. Pour mémoire l’article 2309 du code civil réaffirme que la caution est subrogée dans les droits du créancier lorsqu’elle a payé tout ou partie de sa dette.
Le sort des garants et coobligés est amélioré.
Ces personnes peuvent se prévaloir des mesures accordées au débiteur dans le cadre de l’accord de conciliation (délai de grâce, selon l’article L. 611-7 C. com., en particulier).
En cas de caducité de l’accord, les garanties prises pour assurer l’exécution de l’accord produiront leurs effets puisque l’article L 611-10-4 vient mettre fin à la jurisprudence antérieure de la cour de cassation ( Com. 25 sept. 2019, n° 18-15.655)
Le débiteur doit informer le mandataire judiciaire de l’identité des garants et coobligés personnes physiques qui seront informés par le mandataire judiciaire de la possibilité de demander à bénéficier d’une procédure de surendettement.
• Extension en redressement judiciaire du bénéfice de la règle de l’arrêt du cours des intérêts de l’article L. 622-28 dont les personnes physiques coobligées ou ayant consenti une sûreté personnelle ou affecté ou cédé un bien en garantie bénéficiait en sauvegarde.
De même ces personnes pourront se prévaloir des dispositions du plan.
• Le principe de non-accroissement de l’assiette d’une sûreté réelle conventionnelle ou d’un droit de rétention conventionnel est établi par l’article L. 622-21, II, du code de commerce. Toutefois, il existe une exception pour les cessions de créances prévues à l’article L. 313-23 du code monétaire et financier en exécution d’un contrat-cadre antérieur à l’ouverture de la procédure.
La règle de l’arrêt des poursuites par les créanciers du débiteur s’applique aussi au bénéficiaire d’une sûreté réelle constituée par le débiteur en garantie de la dette d’autrui.
Les conditions de la déclaration de créance sont précisées, notamment si la sûreté n’a pas fait l’objet d’une publicité.
La déclaration doit indiquer des éléments prouvant la nature de la sûreté, son existence et son assiette (C. com., art. R. 622-23, 3° et 4° mod.).
Le bénéficiaire d’une sûreté réelle se voit imposer l’obligation de solliciter un relevé de forclusion à défaut de déclaration dans les délais (C. com., art. L. 622-26).
La sanction de la sûreté non déclarée est l’inopposabilité à l’égard du débiteur pendant l’exécution du plan et même après lorsque les engagements ont été tenus.
L’ordonnance ajoute que l’inopposabilité des personnes « protégées » s’étend désormais au-delà de l’exécution du plan.
Le coobligé ou garant peuvent contester l’état des créances (C. com., art. L. 624-3-1). Ces personnes ne peuvent se voir opposer l’état des créances lorsque la décision d’admission ne leur a pas été notifiée.
Enfin Il existe des privilèges en cas d’apport de trésorerie, soit en période d’observation (C. com., art. L. 622-17, III, 2°), les apports étant autorisés par le juge-commissaire dans la limite nécessaire à la poursuite de l’activité pendant la période d’observation.
Ils font l’objet d’une publicité et figurent au deuxième rang du paiement des créances prévues à l’article L. 622-17, III. En outre, les apports de trésorerie pourront bénéficier d’un privilège même en cours d’exécution du plan (C. com., art. L. 626-2).
Cela devrait être possible en liquidation judiciaire en application de l’article L. 622-17 et de l’article L. 641-14, dès lors qu’il s’agit d’assurer la poursuite d’activité qui est possible en liquidation judiciaire.
Nathalie HAUSMANN
Avocat Associé