Les aveux très partiels de Sid-Ahmed GHLAM au premier jour du procès en appel de l’attentat de Villejuif
© BENOIT PEYRUCQ / AFP
Ce lundi 27 septembre 2021, c’était l’ouverture du procès en appel de Sid-Ahmed GHLAM devant la Cour d’assises d’appel spécialement composée en matière terroriste.
C’est une ouverture en toute discrétion, comparée à celle, il y a quelques jours, du très médiatique procès des attentats du 13 novembre, à quelques pas de la salle Voltaire où se tient le procès de Sid-Ahmed GHLAM et cinq de ses comparses logisticiens, dans le Palais de justice historique de Paris.
Et pourtant, c’est une journée riche à laquelle ont pu assister les intervenants…
On se souviendra que le dimanche 19 avril 2015 au petit matin, Sid-Ahmed GHLAM, jeune étudiant dont la famille était installée à Saint-Dizier (52), avait comme projet de s’attaquer aux fidèles présents dans une église de Villejuif.
Ayant besoin d’une voiture pour commettre son crime, il décidait de s’en prendre à une jeune femme, qui attendait dans son véhicule stationné sur un parking le début de son cours de pilates, Aurélie CHATELAIN.
Il l’abattait froidement à l’arme de poing.
En remettant son révolver dans la ceinture de son pantalon, il se tirait malencontreusement (et heureusement) une balle dans la cuisse, blessure qui le déstabilisait et le contraignait à stopper son projet terroriste pour appeler le SAMU.
Les enquêteurs établissaient rapidement le lien entre Sid-Ahmed GHLAM et la mort d’Aurélie CHATELAIN.
En première instance (octobre/novembre 2020), il avait été condamné à la réclusion criminelle à perpétuité assortie d’une période de sûreté.
Des aveux…
Sid-Ahmed GHLAM, qui avait jusqu’à présent toujours (très) fermement nié s’être rendu en Syrie et y avoir rencontré Abdelnasser BENYOUCEF (alias Abou Mouthana) et Samir NOUAD (alias Amirouche), ses commanditaires issus de la COPEX de l’Etat Islamique, et ce malgré les éléments accablants démontrant le contraire, a spontanément reconnu y être allé.
Tout au long de son interrogatoire du jour, Sid-Ahmed GHLAM s’est employé à démontrer qu’il avait « changé », « évolué », qu’il ne souhaitait plus « dissimuler » (par référence à la Taqîya, stratégie organisée de dissimulation rendue licite par les préceptes religieux).
C’est ainsi qu’il a reconnu au moins un voyage en Syrie.
Il faut dire que cette position était intenable tellement les éléments étaient accablants :
• Preuve qu’il a effectué deux voyages en Turquie en novembre 2014 et février 2015 ;
• Exposé des enquêteurs de la SDAT en première instance, devant la Cour d’assises, démontrant qu’il ne pouvait en être autrement s’agissant d’un attentat orchestré depuis le territoire de l’Etat Islamique ;
• Stratégie de projection de l’État Islamique, basée sur une sélection pour commettre un attentat en Europe, une formation et un retour en Europe avec développement de liens opérationnels pour la préparation de l’attentat ;
• Témoignage de Sonia MEJRI, ex-épouse d’Abdelnasser BENYOUCEF.
Limités…
Sur question de la Présidente de la Cour, il n’a pas reconnu l’assassinat d’Aurélie CHATELAIN et la tentative d’attentat contre l’Église de Villejuif, mais a seulement indiqué avoir « une part de responsabilité ».
La reconnaissance de ce passage en Syrie semble ainsi purement opportune : acculé dans le mensonge, il se devait d’évoluer lors de ce nouveau procès.
Ira-t-il plus loin en expliquant ce qu’il a fait sur le territoire de l’État Islamique ? Rencontre, entrainement militaire, maniement des armes, enseignements religieux, explications sur les méthodes de communications, vidéos de revendication comme pour les auteurs des attentats du 13 novembre... ?
Reconnaîtra-t-il Abdelhamid ABAAOUD comme étant bien le Abu OMAR qui lui a apporté une aide opérationnelle pour la préparation de ses crimes ?
Reviendra-t-il sur ses déclarations abracadabrantesques impliquant Samy AMIMOUR, terroriste du Bataclan, dans la mort d’Aurélie CHATELAIN ?
Finira-t-il par avouer et assumer l’assassinat d’Aurélie CHATELAIN, jeune mère de famille ?
Selon l’actuel planning d’audience, Sid-Ahmed GHLAM ne devrait plus s’exprimer sur les faits avant les 14, 15 et 18 octobre prochains.
Laura Costes, Avocat
Alicia Renard, juriste
Pôle attentats, Cabinet ACG