Mort de Bastien Payet, agressé en pleine rue : cinq ans après, ses proches attendent toujours le procès

Publié le 21 février 2024
France 3

Cinq ans après la mort de Bastien Payet, étudiant de 23 ans tabassé en pleine rue à Reims (Marne), ses proches attendent toujours le procès de ses trois agresseurs. Malgré une instruction achevée depuis un an et demi, aucune date n’a été annoncée.

“On n’oubliera jamais, mais on aimerait avancer. Le procès sert à ça et à être reconnue en tant que victime. Ma vie s’est arrêtée le 10 mars 2019”, assène la maman de Bastien Payet en rappelant cette date fatidique, celle de la mort de son fils à 23 ans. 

En 2019, dans la nuit du 8 au 9 mars, il est environ 3 heures du matin quand le jeune homme marche avec des amis en centre-ville de Reims, rue Jeanne d'Arc. Trois individus en état d’ébriété lancent des blagues grivoises aux deux filles du groupe. Bastien Payet, jeune étudiant en droit, intervient. En réponse, il est roué de coups, notamment à la tête. Suite à ce déferlement de violence, il est transporté dans un état critique à l’hôpital, où il succombe à ses blessures, le lendemain. 

Pas de date de procès

Cinq ans après, le procès n’a pas eu lieu et aucune date n’a été annoncée. Pourtant, l’instruction s’est achevée il y a un an et demi avec le renvoi en cour d’assises des trois accusés pour “coups mortels ayant entraîné la mort sans intention de la donner”, un crime puni de 15 ans de prison minimum. 

Une attente vécue comme une “épée de Damoclès” par la maman de Bastien, qui, peu à peu, “perd confiance en la justice”. Se préparer, ressasser les événements, espérer une condamnation… Sans procès, Frédérique Couturier se dit dans l’incapacité de “sortir la tête de l’eau”, avec la sensation d’être “laissée pour compte” et “oubliée”.

 

Laurent Etienne, ami de Bastien et acteur du milieu culturel rémois, nourrit les mêmes espoirs : “On attend le procès comme quelque chose de salvateur qui permettra de boucler la boucle.”

Les accusés sous contrôle judiciaire

D'autant que l’avocate de la famille, maître Pauline Manesse, confirme qu’il n’y a “aucune raison juridique expliquant que le procès ne soit pas organisé”. Alors, comment expliquer ce délai ? La juridiction indique que dans la mesure où les accusés sont sous contrôle judiciaire, “on ne se trouve pas dans les délais qui imposent la rapidité de la tenue du procès”, rapporte-t-elle, qualifiant la situation d’”inacceptable”. 

Après les faits, deux des trois suspects étaient restés en détention provisoire pendant un an et cinq mois, le troisième quelques mois de plus.

Aujourd’hui, ils ont l’autorisation de revenir à Reims. “Votre unique enfant est mort tabassé et vous pouvez croiser ces individus dans la rue”, dénonce Laurent Etienne, 45 ans. “Ils ont donné la mort et maintenant ils sont en liberté, ils ont retrouvé une petite vie tranquille”, regrette Frédérique Couturier : 

 

Double peine pour les victimes

Tous deux voient dans cette lenteur une banalisation de la violence, créant chaque jour un sentiment d’injustice plus fort, avec la crainte que le temps qui passe n’efface l’atrocité des actes, comme l’explique Frédérique Couturier :“On voudrait nous faire culpabiliser en disant que depuis cinq ans ces trois individus sont respectables, qu’ils ont validé un BTS en détention provisoire. Moi, mon gamin, j’aurais bien aimé qu’il puisse passer son diplôme au lieu d’être au cimetière.”

Car le deuil, lui, reste un combat de tous les instants. “Ils ont tué un individu et avec lui, toute une famille. Ils m’ont pris mon fils unique, mon travail puisque je suis en invalidité, ma santé, ma vie. Ils ont fait le malheur”, déplore sa maman.

“C’est une absence”, complète Laurent Etienne avant de rappeler qui était le jeune homme : un slameur, un élève exemplaire, entraîneur de football pour les petits et même candidat à l’émission ‘Les 12 coups de midi’. La voix tremblante d’émotion, il conclut : “On voit sa mère malheureuse. Et elle, elle a pris perpétuité.”

Contactées les autorités judiciaires n'ont pas donné suite à notre demande d'informations. 

Article écrit par Leslie Larcher

 

 

Pauline MANESSE-CHEMLA, avocate pour les victimes
Pauline MANESSE-CHEMLA
Avocat associé