L'aéroport de Vatry condamné pour licenciements abusifs et harcèlement moral
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En janvier 2021, la création d'une section syndicale CDFT au sein de l'aéroport de Vatry s'était accompagnée d'une salve de dénonciations mettant clairement en cause le directeur de l'époque, Christophe Parois : management toxique, harcèlement moral, mises à pied non justifiées, etc. Trois ans plus tard, l'établissement public de gestion de l'aéroport était condamné par le tribunal administratif de Châlons à dédommager son ancienne directrice administrative et financière pour harcèlement moral, à hauteur de 9 500 €. Deux autres ex-cadres ont obtenu gain de cause en justice, après des années de procédures.
« UNE AFFAIRE TORDUE » CLASSÉE SANS SUITE
Laurent Lucot a travaillé plus de 21 ans au sein de l'aéroport. Il a été mis à pied puis licencié pour faute grave en avril 2021, après avoir assuré la direction par intérim de Vatry durant six mois sur décision du conseil d'administration. Motif invoqué : le détournement de mails liés au secret professionnel. « Les experts près la cour d'appel de Reims ont démontré par A + B que ces accusations ne tenaient pas la route, souligne-t-il. Il n'y avait absolument rien, c'était une affaire tordue, montée de toutes pièces. » Affaire également classée sans suite par le parquet et les Prud’hommes de Châlons. « Mon avocat a mis en avant le harcèlement moral dont j'ai été victime. » Résultat : la cour a reconnu « le caractère violent » de son licenciement et les faits de harcèlement. L'établissement public devra lui verser plus de 200 000 € de dommages et intérêts. Laurent Lucot est resté plus d'un an sans emploi. Il a retrouvé un poste dans la fonction publique hospitalière en juin 2022 et se dit soulagé d'avoir été mis hors de cause. « La justice a permis de rétablir la vérité. Je savais que je n'avais rien fait, mais ça a été une période très difficile malgré tout. »
ENVIRON 400 000 € DE FACTURE POUR VATRY
Lui aussi licencié pour le même motif, en mars 2021, Roger Gallois avait été embauché à Vatry en 2006. L'ancien responsable informatique déplore, aujourd'hui encore, la position du Conseil social et économique de l'époque, pourtant censé défendre les salariés. « Ils ont couvert les agissements de la direction, ni plus ni moins. » Là encore, l'enquête de la gendarmerie et les expertises ont abouti à un non-lieu concernant le prétendu détournement de mails. « Le directeur m'avait demandé de lui fournir les mots de passe des salariés, ce qui est complètement illégal ! Les Prud'hommes l'ont bien confirmé. On a gagné sur toute la ligne. J'étais serein, mais j'ai ressenti le syndrome de l'imposteur. Je remettais en cause mes compétences, je me demandais si je pourrais continuer dans cette branche. Ce genre de situation a aussi un impact sur nos proches. À aucun moment notre sincérité n'a été mise en doute. La CFDT et le cabinet d'avocats ACG (note : Maître Olivier BARNEFF et Maître Chantal FOCACHON) nous ont énormément accompagnés. Ils ont fait un travail phénoménal. » Désormais responsable informatique dans une société privée, Roger Gallois sera dédommagé à hauteur de plus de 100 000 € pour licenciement abusif. Ce à quoi s'ajoute le remboursement, dans les six mois à venir, des indemnités chômage versées par France Travail aux deux anciens cadres. La facture globale avoisine les 400 000 € pour Vatry, déjà dans le rouge financièrement.
Sonia LEGENDRE, l'Hebdo du vendredi.