Clause d’exclusivité : à utiliser avec une grande parcimonie
La clause d’exclusivité se retrouve dans de nombreux contrats de travail, comme allant de soi.
Une jurisprudence récente de la Cour de Cassation en date du 16 mai 2018 appelle au contraire à la plus grande prudence dans l’utilisation de cette clause.
En effet si la Cour de Cassation avait antérieurement rendu des décisions de principe en juillet 2000 concernant des salariés à temps partiel et plus précisément des VRP, elle avait déjà été amenée à préciser à l’époque que dans la mesure où une telle clause porte atteinte à la liberté du travail elle devait être, pour être valable, justifiée par la nature de la tâche à accomplir et proportionnée au but recherché.
Les décisions de 2000 n’étaient pas discutables dans la mesure où elles concernaient des salariés à temps partiel et la clause d’exclusivité incluse dans leur contrat les empêchait de fait d’exercer une activité complémentaire.
La récente décision de 2018 concerne elle un salarié à temps plein qui occupait les fonctions de chef de marché marketing et qui avait créé, en plus de son activité de salarié, une société de vente en ligne de vêtements et avait été licencié pour ce motif issu du non respect de la clause d’exclusivité par son employeur.
La Cour de Cassation confirme la décision rendue par la Cour d'Appel qui a jugé le licenciement non fondé, en indiquant que la clause était rédigée en termes généraux et imprécis, ne spécifiant pas les contours de l’activité complémentaire, et ne permettant pas de limiter son champ d’application ni de vérifier si elle était justifiée par la nature de la tâche à accomplir, proportionnée au but recherché et n’apportant pas de ce fait une restriction excessive à la liberté du travail.
La clause prévoyait pourtant la possibilité pour le salarié de demander l’autorisation préalable à son employeur afin d’engager une activité complémentaire.
Au vu de cette jurisprudence, il apparait donc nécessaire si l’employeur souhaite impérativement inclure une clause d’exclusivité, que celle-ci soit précise sur ses limites, activité bénévole ou lucrative, professionnelle ou de loisir. Plus les restrictions à la liberté du travail seront à la fois détaillées et limitées, et plus elles seront motivées, plus la clause trouvera alors sa pertinence et sa capacité d’application.
Le simple fait de l’inscrire en termes généraux n’est donc plus cohérent, même si le salarié est engagé dans le cadre d’un temps complet.
« Mais attendu qu'ayant constaté que la clause d'exclusivité était rédigée en termes généraux et imprécis ne spécifiant pas les contours de l'activité complémentaire qui serait envisagée par le salarié, activité bénévole ou lucrative, professionnelle ou de loisirs et qu'ils ne permettaient pas dès lors de limiter son champ d'application ni de vérifier si la restriction à la liberté du travail était justifiée et proportionnée, la cour d'appel, qui n'avait pas à procéder à une recherche inopérante au vu de ces constatations, a légalement justifié sa décision ».(Cassation sociale du 16.05.2018, n°16-25.272)
Gérard THIEBAUT
Avocat en Droit du Travail dans la Marne (51)