Cession de bail : quand les manquements antérieurs au renouvellement du bail justifient le refus de cession du bail ; précision récente de la jurisprudence

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Dans un article précédent, nous évoquions les conditions de cession de bail rural à un membre de sa famille (« Je souhaite céder mon bail rural à un proche, comment dois-je procéder ? » )  

Dans cet article, il était rappelé que la Cour de cassation exige que la faculté de céder est réservée au preneur de bonne foi qui s’est constamment acquitté de ses obligations. 

L'autorisation de céder le bail rural à certains membres de la famille du preneur est une exception au principe de la prohibition des cessions (article L. 411-35 du code rural). 

Elle est subordonnée à la bonne foi du preneur cédant. 

Au sens du Code rural et de la jurisprudence, la bonne foi se définit par le respect scrupuleux et constant des obligations légales et contractuelles du preneur à l'égard du bailleur.

Dans un arrêt récent (Cass. 3e civ., 4 juill. 2024, n° 22-23.715, n° 388 F-D), la Haute Juridiction réaffirme une position stricte avec le preneur cédant. 

Les manquements du preneur à ses obligations, antérieurs au renouvellement du bail, peuvent justifier le refus d'autoriser la cession du contrat au profit du fils du fermier. 

Il est indifférent qu'ils ne se soient pas poursuivis après ce renouvellement. 

En l'espèce, le propriétaire avait délivré un congé aux époux copreneurs au motif qu'ils avaient atteint l'âge légal de la retraite. Ces derniers ont contesté le congé et sollicité du tribunal paritaire l'autorisation de céder le bail à leur fils. Leurs demandes ont été rejetées. Avant qu'un renouvellement du bail n'intervienne au profit de la seule épouse, les conjoints avaient mis le bail à disposition d'un GAEC. Or, à cette époque, l'épouse n'était pas associée ainsi qu'elle l'aurait dû. La situation avait toutefois été régularisée ensuite, postérieurement au renouvellement. 

Si les manquements du preneur à ses obligations doivent avoir des effets qui se poursuivent après le renouvellement pour justifier la résiliation du bail (Cass. 3e civ., 14 déc. 2023, n° 22-20.257, n° 824 FS-B), il en va différemment sur le terrain de l'autorisation de cession du bail. 

S'agissant du défaut d'association d'un des copreneurs lorsque le bail a été mis à disposition d'un GAEC, il est de jurisprudence constante que s'il ne peut servir de fondement à la résiliation du contrat de location, il est de nature à priver les preneurs de leur faculté de le céder à son conjoint, partenaire de PACS ou descendant (Cass. 3e civ., 3 févr. 2010, n° 09-11.528, n° 151 FS - P + B : Bull. civ. III, n° 29 : Rev. loyers 2010, p. 177, note B. Peignot ; Cass. 3e civ., 14 févr. 2012, n° 10-28.804 ; Cass. 3e civ., 5 juin 2013, n° 12-18.465, n° 662 FS - P + B ; Cass. 3e civ., 27 mars 2013, n° 12-15.307 : Rev. loyers 2013, p. 238, note B. Peignot).

La troisième chambre civile de la Cour de cassation réaffirme deux points essentiels pour l'appréciation de la bonne foi dans le cadre d’une demande de cession de bail :

  • le renouvellement du contrat est sans influence, même si les manquements ne se sont pas poursuivis après le renouvellement du contrat

  • le défaut d'association d'un des copreneurs lorsque le bail a été mis à disposition d'une société justifie le refus de cession du bail au profit d’un descendant 


L’appréciation de la bonne foi du preneur - sous le prisme d’une demande de cession de bail - se distingue des manquements pouvant justifier la résiliation du bail rural.  

La cession de bail doit s’anticiper au plus tôt dans la gestion de l’exploitation, au risque de se voir opposer un refus catégorique du Tribunal. 

 

Maître Perrine FOURTINES ROCHET 

Avocat associé en droit rural 

Perrine FOURTINES ROCHET, avocate à Reims
Perrine FOURTINES ROCHET
Avocat associé

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