La place des pères en cas de séparation
Beaucoup de pères sont persuadés qu’en cas de séparation, les mères bénéficient, par la loi ou la volonté des juges, d’une priorité pour obtenir la résidence de leurs enfants auprès d’elles. Cela n’est pas vrai.
Lorsque des parents se séparent, la question de l’organisation de la nouvelle vie des enfants se pose inévitablement. Habiteront-ils chez leur père, chez leur mère, à quelle fréquence verront-ils chaque parent ?
La loi prévoit d’abord que l’autorité parentale appartient aux deux parents jusqu’à la majorité de l’enfant, même en cas de séparation. Elle précise que le juge, lorsqu’il est saisi d’un litige, peut fixer le lieu de résidence des enfants en alternance au domicile de chacun des parents ou au domicile de l’un d’eux. Dans l’énoncé de la loi, aucune priorité n’est donc donnée, ni à un parent, ni à un mode de garde.
En réalité, la question qui se pose au juge n’est pas de savoir qui est le meilleur parent, mais quelle solution préserve le mieux l’intérêt des enfants, en d’autres termes, quel parent sera le mieux organisé, le plus disponible, le plus respectueux de l’autre parent, le plus attentif à l‘équilibre des enfants, au respect de leurs rythmes de vie, de l’organisation de leurs activités scolaires et de loisirs…
Souvent les mères ont une avance dans la plupart de ces domaines, ce qui fait privilégier la fixation de la résidence des enfants auprès d’elles. Mais lorsque les pères se sont investis dans la vie quotidienne de leurs enfants, ils obtiennent la mise en place d’un système de résidence alternée (voir article sur ce point).
Ils obtiennent aussi parfois que la résidence des enfants soit fixée chez eux.
Concrètement, lorsque les parents sont déjà séparés, le juge se réfère à la pratique précédemment mise en place, pour analyser les différents critères qui permettent de dégager ce qui semble être l’intérêt de l’enfant.
Ainsi, des pères ont pu obtenir que la résidence de leurs enfants soit fixée par décision de justice à leur domicile parce que la mère a choisi de partir sans emmener les enfants (une mère contrainte par le père de quitter le domicile sans ses enfants se les verra au contraire confier).
Une mère qui s’établit à une grande distance du domicile du père et rend difficile le maintien de relations personnelles entre le père et les enfants s’expose à perdre la possibilité de garder ses enfants auprès d’elle.
Le juge peut aussi prendre en compte la parole de l’enfant.
Ainsi le juge aux affaires familiales du Tribunal de Grande Instance de Troyes a-t-il pu fixer en 2013 la résidence de 3 enfants, âgés de 14, 11 et 6 ans au domicile du père sur un double motif. Le juge a retenu d’abord que les deux aînés, qui avaient refusé de suivre leur mère lorsqu’elle est partie à plus de 300 km, ont exprimé leur souhait de rester auprès de leur père. Il a décidé ensuite que si la mère a toute liberté pour vivre là où elle le souhaite, elle ne peut vouloir que les conséquences de sa décision et l’expression de sa liberté soient supportées par l’enfant le plus jeune par le biais d’une séparation de la fratrie, séparation dont les enfants souffrent.
La décision de fixer la résidence des enfants au domicile de leur père est donc très clairement fondée sur l’intérêt des enfants qui est d’être entendus dans l’expression de leur désarroi et protégés des choix parentaux qui bouleversent trop profondément leur équilibre de vie.
Il ne s’agit jamais pour un juge de choisir un parent au détriment de l’autre, qui bénéficiera de toute façon d’un droit de visite et d’hébergement. Il s’agit de prendre en compte le point de vue de l’enfant, d’envisager la solution qui l’exposera à moins de souffrance, sans a priori sur les parents.
De la sorte, les pères, qui s’investissent aujourd’hui davantage dans la vie de leurs enfants, ont une place reconnue, qui n’est pas moindre que celle des mères. Il n’est pas rare d’ailleurs de voir des enfants habiter chez leur mère, puis chez leur père, puis éventuellement revenir chez leur mère, en fonction de leur maturité ou des choix de vie des parents.
Le 8 janvier 2014, article rédigé par Maître Isabelle DOMONT-JOURDAIN du cabinet ACG
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La question se posait de savoir si, dans l’hypothèse où l’enfant mineur résidait au domicile de l’un de ses parents séparés, seule la responsabilité de celui-ci était engagée.
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