Affaire Karima : KARBAL Dandouni condamné à 25 ans de réclusion
Le 13 décembre à 11h25 par Ismaël Karroum
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«Coupable.» «Vingt-cinq ans de réclusion criminelle, interdiction de séjour définitive sur le territoire national.» Les mots ont d’abord résonné dans la tête de Karbal Dandouni, groggy dans le box. Il est resté assis. A encaissé. Puis il s’est adressé à sa famille. En arabe. «Ne vous inquiétez pas. Je vous aime tous, vous resterez toujours dans mon cœur.»
Puis Karbal Dandouni, condamné, a continué de crier son innocence. Et il a explosé, s’emportant à l’encontre des frères de Karima Benhellal, ceux qui l’accusent depuis maintenant huit ans du meurtre de leur sœur, Karima.
Des insultes en arabe, d’abord. Puis: «Elle est où ta sœur aujourd’hui? C’est juste la vengeance. Vingt-cinq ans et ta sœur est où? Tu dis que tu t’inquiètes pour ta sœur? Moi, j’ai huit sœurs. Tous les jours je m’inquiète pour elle! Et toi, tu la vois pas pendant dix ans, tu t’occupes pas d’elle, t’attends deux ans pour dire qu’elle a disparu et tu dis que tu t’inquiètes pour elle.» Mohamed Benhellal retient l’un de ses jeunes frères.
Dans la salle des pas perdus, sur les marches du palais de justice d’Angoulême, les larmes des femmes du clan Dandouni ruissellent sous la pluie. Rabiah, la femme de Karbal Dandouni, est au bord de l’évanouissement. Un jeune homme aussi.
Dans la salle, la famille Benhellal fait bloc. Prostrée. Elle voulait justice, était convaincue que Karbal Dandouni avait tué Karima, l’avait fait disparaître au Maroc pendant l’été 2005. Cette vérité, ils la clamaient depuis 2007, depuis que Mohamed Benhellal avait envoyé une lettre au procureur de la République de Châlons-en-Champagne pour faire part de ses doutes et dire qu’à ses yeux, Karbal Dandouni était vraisemblablement à l’origine de la disparition de sa sœur.
Cette thèse, les enquêteurs, le juge d’instruction, l’avocat général l’ont partagée.«Si j’avais un doute, je vous demanderais de l’acquitter. Mais à l’heure de me lever pour requérir, je n’ai aucun doute», a scandé Patrice Camberou, l’avocat général.
Pour lui, comme pour Me Gérard Chemla, l’avocat de la famille Benhellal, tous les éléments de la culpabilité étaient réunis dans le volumineux dossier. Le voyage inhabituel au Maroc, l’absence de signe de vie, les retraits d’argent à Casablanca et, surtout, les auditions de la femme, de deux sœurs et deux beaux-frères de Karbal Dandouni qui, pendant six mois, ont assuré que c’est Rabiah Dandouni qui étaient revenue du Maroc le 24 août 2005 aux côtés de Karbal.
Ils avaient dit autre chose avant, autre chose après. Mais pendant six mois, de juin à décembre2009, alors que Karbal Dandouni était incarcéré, leurs déclarations ont bétonné l’édifice de l’accusation et ouvert les portes de la réclusion.
«Ce murmure
réclame justice»
Hier matin, avant de se rendre, libre, devant la cour d’assises, Karbal Dandouni a embrassé ses enfants un peu plus fort que d’habitude. Mais il avait espoir que ses cris d’innocence soient entendus. Malgré les nombreux éléments qui convergent vers lui, il a répété son innocence tout au long de la semaine. Et chaque jour, il s’est présenté face à la cour. «Pourquoi je partirais? Dieu ne peut pas me laisser condamner. Je n’ai rien fait, ce n’est pas possible», confiait-il entre deux cigarettes lors des suspensions d’audience.
Et de redire son innocence. De répéter la même version, ici comme face aux jurés, devant la cour comme face aux enquêteurs. «Je suis rentré avec Karima et je l’ai déposée à Bordeaux. Je ne l’ai pas tuée. Elle n’est pas au Maroc. Pourquoi tout le monde dit que je l’ai tuée?»
Gérard Chemla n’avait aucun doute et sa plaidoirie ciselée aux airs de réquisitoire implacable a porté. Pourtant, comme des lions dans l’arène, ses avocats, Zouhir Beaiz et Rachid Rahmani, ont plaidé avec passion. Tenté d’instiller le doute. «Les faits sont têtus et là, il n’y a pas de faits! Il y a une histoire, pas jolie, que l’on vous raconte. Mais il n’y a pas de faits», a tonné Rachid Rahmani.
Ils ont donné leur version du dossier, leur lecture des différents éléments à charge.
Ce que les jurés ont entendu, c’est le murmure susurré par l’avocat général, Patrice Camberou. «Il reste un souvenir comme un murmure à peine audible, un souffle de vent qui parcourt le désert et cette cour d’assises, qui pénètre sous la terre du Maroc et dans les traverses de la salle d’audience, rejoint les embruns sur la mer entre Tanger et Algeciras, qui roule le dernier soupir de Karima. Ce murmure imperceptible réclame justice.»
Vingt-cinq ans ont dit les jurés. Karbal Dandouni et ses avocats feront vraisemblablement appel et un deuxième procès devrait se tenir à Bordeaux.
Mais il reste une vérité: personne ne sait aujourd’hui ce qu’est devenue Karima Benhellal.
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"Ce que l'on vous présente est partiel et partial, démarre sur un parti pris. Et on ne peut pas condamner un homme sur un parti pris". Tout au long de l'après-midi, Rachid Rahmani et Zouhir Beaiz, ont tenté de convaincre les jurés de l'innocence de Karbal Dandouni. "On vient vous détricoter ce dossier, cette pelote un peu informe", dénonce Rachid Rahmani qui rappelle la constance de ce procès:"Karbal Dandouni. Il n'a jamais varié d'un iota".
"Je défends cet homme parce que je suis convaincu de son innocence. Si je n'en étais pas convaincu, je ne le laisserai pas dire à la Cour qu'il n'a rien fait, ne serait-ce que par respect pour la famille Benhellal", a asséné Zouhir Beaiz, au cours d'une plaidoierie fleuve. Il a martelé sa conviction, pointé les zones d'ombre du dossier, les mystères de la vie de Karima: son départ précipité de la Marne, son absence de liens avec sa famille, sa participation à l'élaboration de mariage blanc.
"Les faits sont têtus et là, il n'y a pas de faits! Il y a une histoire, pas jolie, que l'on vous raconte. Mais il n'y a pas de faits", a tonné Rachid Rahmani. Ils ont donné leur version du dossier, leur lecture des différents éléments à charge. Rappelé que même le juge des libertés et de la détention a préféré remettre Karbal Dandouni en liberté, après à peine un an de détention provisoire, estimant, dans son ordonnance que "les conditions de la détention provisoire ne sont plus réunies". Le parquet n'avait pas fait appel, à l'époque.
Il a rappelé les doutes, "le silence des faits", le "tapage de la conviction policière fondée sur une fausse expertise graphologique".
Surtout Rachid Rahmani a aussi livré des chiffres, glaçants: "En France, en 2005, il y a eu 9700 disparitions inquiétantes en France, dont plus de 800 mineurs".
Certaines ne sont jamais retrouvées.
S'adressant aux jurés, Rachid Rahmani a dit: "On vous le confie, Karbal Dandouni".
Verdict attendu en fin de soirée.
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Vingt-cinq ans de réclusion criminelle. C'est ce que Patrice Camberou, l'avocat général, vient de requérir contre Karbal Dandouni. Vingt-cinq ans au nom de Karima, 25 ans pour ce qui, à ses yeux et à ceux de Gérard Chemla, n'est plus un mystère. "Karbal Dandouni a assassiné Karima Benhellal. J'en ai la conviction".
Il a prévenu les jurés: "Si vous avez un doute, vous l'acquitterez. Si j'avais le moindre doute en me levant, je réclamerais la même chose. Mais j'analyse les preuves et je n'ai aucun doute".
Juste avant, dans une plaidoirie ciselée aux airs de réquisitoire implacable, Gérard Chemla a aussi transmis sa conviction. Celle d'une Karima utilisé comme "un réservoirs à papiers" par Karbal Dandouni. Celle d'une Karima battue. D'une Karima assassinée.
"Pas de corps, pas de preuve. Pas de preuve, pas de crime (...) Le crime était parfait, mais il n'était pas suffisamment parfait", a analysé l'avocat de la famille Benhellal. Il a insisté sur les conditions inhabituelles de ce voyage au Maroc, les retraits dans les distributeurs de Casablanca, le sac de Karima vu au Maroc dans les mains de Karbal. "Ils sont arrivés à Tanger. Là, il y a un laps de temps de 8 à 10h. C'est là que Karima a disparu et qu'il s'est débarrassé du corps. Il nous dit que la voiture est tombée en panne, qu'il a pris une chambre d'hôtel qu'il n'a pas utilisée. Non, dans ce laps de temps, il a fait disparaître Karima".
Sur l'absence de corps, Gérard Chemla a rappelé les affaires Chanal, Fourniret, Emile Louis, et leurs disparus devenus victimes. "Dans certaines conditions précises, une disparition inexpliquée cache un meurtre. C'est le cas ici".
Le mobile? Faire venir en France Rabiah, sa seconde épouse. Avec son fils."Parce qu'avec un fils, on est indéboulonnable du territoire nationale", a estimé Gérard Chemla.
Les plaidoiries de Mes Rahmani et Me Beaiz, avocats de Karbal Dandouni, vont débuter. Ils plaident l'acquittement.
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