L’application de la législations sur les risques professionnels en cas de changement légal d’employeur
L’article L 1224-1 du Code du Travail dispose :
« Lorsque survient une modification dans la situation juridique de l’employeur, notamment par succession, vente, fusion, transformation du fonds, mise en société de l’entreprise, tous les contrats de travail en cours au jour de la modification subsistent entre le nouvel employeur et le Personnel de l’entreprise. » La question qui se pose est celle de l’impact de ce changement légal d’employeur vis-à-vis des droits attachés à la reconnaissance d’un accident du travail, d’une maladie professionnelle ou d’une rechute liée à ces accidents CHEZ LE PREMIER EMPLOYEUR.
L’action en reconnaissance de faute inexcusable du salarié n’est ouverte que contre un accident du travail ou une maladie professionnelle.
Toute action de reconnaissance de faute inexcusable vis-à-vis d’une rechute n’est pas permise par la loi.
Dans l’hypothèse d’un changement légal d’employeur, l’action en reconnaissance de faute inexcusable fait, elle, partie des droits à transférer avec le contrat de travail et quel employeur doit être actionné en ce sens.
La Cour de cassation, aux termes d’un arrêt du 17 septembre 2015, a admis que le nouvel employeur pouvait être attrait devant les juridictions de Sécurité Sociale pour faire reconnaître la faute inexcusable liée à son accident du travail ou sa maladie professionnelle (N°14-24.534).
Il faut néanmoins réserver les cas particuliers, visés à l’article L 1224-2 du même Code du Travail qui prévoit l’absence de transfert des obligations qui incombaient à l’ancien employeur, dans l’hypothèse d’une procédure de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire, ou encore lorsqu’il y a substitution d’employeur, sans qu’il y ait de convention entre ceux-ci.
Dans ce cas de figure, ce sont bien les organes de la procédure collective qu’il faut attraire devant la juridiction de Sécurité Sociale pour faire reconnaître la faute inexcusable.
La Caisse fait alors l‘avance des condamnations à la victime ou ses ayant-droits, charge à cette dernière de faire valoir ses droits dans la procédure collective.
Dans l’hypothèse d’une substitution d’employeur intervenue sans qu’il y ait de convention entre ceux-ci, c’est encore l’employeur initial qui doit être actionné en reconnaissance de faute inexcusable.
Dans tous les autres cas de figure, le nouvel employeur est bien tenu de répondre de toute action en reconnaissance de faute inexcusable.
Le premier employeur reste néanmoins tenu au remboursement des sommes acquittées par le second.
D’un point de vue procédural, cette action en remboursement peut être effectuée dans le cadre de l’instance initiale en reconnaissance de faute inexcusable.
Il s’agit, en effet, d’une demande accessoire à la demande principale.
Le nouvel employeur, de par l’application de l’article L 1224-1 précité, est encore tenu d’appliquer l’ensemble des dispositions protectrices du Code du Travail pour les salariés victimes d’accident du travail ou de maladie professionnelle.
Toutes les dispositions conventionnelles du type garantie de maintien de salaire, ou même garantie de maintien de l’emploi, dans les hypothèses d’accident du travail ou de maladie professionnelle, s’imposent également au nouvel employeur.
L’ensemble de ces principes s’appliquent également dans l’hypothèse d’une application volontaire de l’article L 1224-1 (Cass. Soc. 9 juillet 1992, n°91-40.015).
L’application des dispositions conventionnelles visant à la reprise du Personnel, dans l’hypothèse d’une perte de marché, peut ne correspondre cependant ni à l’application légale ou volontaire de l’article L 1224-1.
Dans ces conditions, l’employeur n’est tenu à aucune obligation (Cass. Ch. Soc. 14 mars 2007, n°05-43.184).
C’est notamment le cas des clauses de reprise de personnel, prévues à la Convention Collective des Entreprises de Propreté figurant dans ce qui est communément appelé « l’annexe 7 ».
Le nouvel employeur, dans l’hypothèse d’un transfert légal, sera également tenu à l’ensemble des obligations liées à la législation sur le risque professionnel et des dispositions protectrices du salarié victime d’un accident du travail, dans l’hypothèse d’une rechute à son service de ce salarié ; et ce, même si l’accident du travail est survenu au service du précédent employeur (Cass. Soc. 1er décembre 1993, n°91-43.478).
Enfin, il convient de rappeler que la protection est admise en cas de rechute au service du second employeur, même lorsque l’article L 1224-1 du Code du Travail ne s’applique pas, dès lors qu’il existe un lien de causalité entre la rechute et les nouvelles conditions de travail (Cass. Soc. 28 mars 2007, n°06-41.375).
Dans la même thématique
Avertir par téléphone un salarié de son licenciement peut s’avérer dangereux
Prime et absence au travail : quelles articulations ?
Une rupture conventionnelle peut-elle être valablement conclue en alternative à un licenciement pour motif disciplinaire ?
La procédure de mise en demeure mise en œuvre par l’employeur qui entend faire valoir la présomption de démission du salarié en cas d’abandon de poste volontaire.
Action de requalification des CDD en CDI : les précisions de la Cour de cassation en 2023
La dispense de reclassement du salarié inapte strictement encadrée par la loi.
Preuve de la faute du salarié : le retour du "client mystère" (Cass.soc. 6 septembre 2023)
Les conditions de validité des clauses de rémunération variable
La libre fixation des salaires implique la liberté de la négociation collective, et également le principe de la liberté contractuelle.
C’est la loi du 11 février 1950 qui a marqué le retour à la libre discussion des salaires, après une période de fixation autoritaire. Les clauses de rémunération variable s’inscrivent dans ce contexte de liberté contractuelle.
Non-concurrence et non-sollicitation : la protection systématique du salarié
Ces deux dernières années, la jurisprudence a confirmé la protection des intérêts du salarié dans les contentieux relatifs à l’application des clauses de non concurrence et de non sollicitation, que ce soit des clauses de non sollicitation du personnel ou de clientèle.
L’occasion de faire le point sur ces notions et l’apport de la jurisprudence.