Le strict délai de notification du licenciement disciplinaire

Publié le 14 décembre 2022
Employeur, soyez vigilant lorsqu’un report de l’entretien intervient afin de vous assurer du respect des délais de notification du licenciement pour motif disciplinaire

Dans un arrêt pédagogique rendu le 28 septembre 2022, la Cour de cassation a eu l’occasion de rappeler le délai strict s’imposant à l’employeur pour notifier au salarié son licenciement pour motif disciplinaire.

En l’espèce, une salariée exerçant en qualité d’attachée commerciale pour une société située en Guadeloupe était convoquée à un entretien préalable à son licenciement fixé le 21 novembre 2016. Elle ne se présentait pas au rendez-vous et l’employeur la convoquait le 5 décembre à un nouvel entretien fixé au 14 décembre. Elle était licenciée le 22 décembre 2016 pour faute grave. S’estimant victime d’un harcèlement moral et soutenant que la notification de son licenciement était trop tardive, elle saisissait la juridiction prud’homale le 2 mars 2017 aux fins de faire annuler son licenciement et de solliciter le paiement de diverses sommes d’argent.

La question en débat dans la présente affaire était la suivante : le délai d’un mois maximum prévu par l’article L1332-2 du code du travail pour notifier au salarié son licenciement pour motif disciplinaire a-t-il été respecté ? Quelle est l’incidence d’un report d’entretien ?

Dans cet arrêt la Cour de cassation rappelle plusieurs solutions traditionnelles en matière de procédure de licenciement.

  • Tout d’abord la lettre de licenciement pour motif disciplinaire doit être notifiée au salarié dans le délai d’un mois à partir de la date de l’entretien préalable
  • Le point de départ de ce délai d’un mois est le jour prévu de l’entretien préalable, et non le lendemain
  • L’absence du salarié à l’entretien préalable n’a pas pour effet de décaler le point départ du délai de notification du licenciement, sauf si le salarié a justifié de son impossibilité de se présenter à l’entretien et que ce dernier a été reporté, à la demande de l’intéressé ou à l’initiative de l’employeur. Dans cette hypothèse, le point de départ du délai de notification est alors fixé à la date du second entretien.
  • Lorsqu’un délai est exprimé en mois ou en années, ce délai expire le jour du dernier mois ou de la dernière année qui porte le même quantième que le jour de l’acte, de l’évènement, de la décision ou de la notification qui fait courir le délai. A défaut d’un quantième identique, le délai expire le dernier jour du mois.
  • Le non-respect du délai de notification prive le licenciement de cause réelle et sérieuse.

Dans l’affaire soumise à la Cour de cassation, l’entretien préalable avait été fixé initialement au 21 novembre 2016, puis reporté à l’initiative de l’employeur au 14 décembre.

Toutefois, il ne ressortait aucunement des éléments du dossier que l’employeur ait été informé par la salariée de son impossibilité d’assister à l’entretien initial, ni qu’il ait fait droit à une demande de report formulée par cette dernière.

Dès lors, le délai de notification débutait le 21 novembre 2016, date du premier entretien fixé, et expirait le 21 décembre 2016 à minuit.

La notification du licenciement disciplinaire, intervenue le 22 décembre 2016, ne pouvait donc qu’être considérée comme tardive et le licenciement jugé dépourvu de cause réelle et sérieuse.

L’employeur doit donc rester vigilant lorsqu’un report de l’entretien intervient afin de s’assurer du respect des délais de notification du licenciement, ou alors refuser tout report de l’entretien préalable.

Olivier BARNEFF
Avocat associé

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